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22/04/2019

Le Christ ressuscité ne fut-il qu’une “vision” ?

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...C’est ce que laissait entendre ce matin un chroniqueur de France Culture à partir d’un livre de Daniel Marguerat paru en mars dernier :


  

Né en 1943, Daniel Marguerat est pasteur de l’Eglise réformée du canton de Vaud et exégète spécialiste de la narratologie : l’étude des techniques et structures narratives dans les récits. Auteur notamment d’ouvrages sur les Actes des apôtres, il a publié en mars 2019 Vie et destin de Jésus de Nazareth (Seuil).

C’est cet ouvrage qu’a parcouru le chroniqueur de France Culture pour composer son billet du lundi de Pâques. Et qu’a-t-il retenu du travail de Marguerat ? Que la foi en la résurrection de Jésus serait venue aux disciples sous la forme du “voir” : donc d’une “vision”, forme spirituelle proche du “songe” – deux phénomènes connus de l’Antiquité. 

On se demande ce qu’en auront conclu les auditeurs de France Culture. On se demande aussi ce qu’en pense réellement M. Marguerat  (et donc ce qu’il prêche dans sa paroisse vaudoise).   

N’ayant pas encore lu son livre, je dois m’en tenir à ce que l’auteur en dit lui-même dans ses entretiens avec la presse. Au Monde de la Bible, par exemple :La première interprétation de la vie et de la mort de Jésus a été la foi en sa résurrection. C’est au travers d’expériences visionnaires, un phénomène de type paranormal, que ses amis, femmes et hommes, ont reçu la conviction inattendue que Dieu se solidarisait avec l’homme pendu au bois.”

La formule “expériences visionnaires” est étrange de la part d’un auteur qui affirme par ailleurs voir le sujet à travers ses “sources documentaires anciennes et abondantes” : sources qui lui permettent par exemple d’établir (approuvons-le) que “la théorie mythiste d’un Jésus imaginaire, récemment promue par Michel Onfray, est une supercherie intellectuelle”. Et qu’il est faux “de penser que l’après-Jésus n’ait rien à voir avec l’avant”, comme le soutiennent les christophobes depuis la lointaine époque de Guignebert…

Mais si l’on prend en compte les “sources documentaires”, on doit admettre que les récits croisés (évangiles et Actes) ne décrivent pas des “expériences visionnaires”. Ils décrivent des rencontres. La résurrection de Jésus est présentée comme un événement, un fait constaté, et même dérangeant puisqu’il ne cadre pas avec l’eschatologie messianique juive. La résurrection est attestée par les apôtres – dès les premières semaines suivant la Passion – avant toute élaboration doctrinale, comme un fait brut : un fait ne concernant d’abord que la dignité personnelle de Jésus et son crédit auprès du Père.

Les récits d’apparitions du Ressuscité sont très anciens et ne sont pas des “visions” : au moment où ces récits furent rédigés, des témoins du fait vivaient encore (Paul en parle). Les divergences mêmes des récits plaident en leur faveur :  “Le caractère chaotique, lacunaire des narrations (voir aussi l’admirable bric à brac de 1Corinthiens 15,5-8) suggère que la tradition ecclésiale a d’abord recueilli un certain nombre de récits autonomes… Ce sont les faits, les événements qui ont paru importants aux rédacteurs et qui sont les matériaux primitifs de leur édifice”, soulignait le Pr Jacques Perret [*], philologue de la Sorbonne spécialiste de l’Antiquité, mais père aussi du mot “ordinateur”.

Le Pr Perret ajoutait : “Attention à ne pas ratiociner dans le vide, mobilisant la science moderne au service de nos présupposés pour faire un tri dans les textes. Nous risquerions d’éliminer un élément qui eût été du plus grand intérêt pour une restitution des origines.”  N’est-ce pas ce que fait M. Marguerat ?  “J’ai voulu présenter un Jésus vraisemblable, raisonnablement reconstruit”, dit-il au Monde de la Bible.

C’est faire un tri dans les textes que d’écarter la sobriété et le concret des récits d’apparitions du Ressuscité. Elles ne sont accompagnées d’aucune gloire, aucune transfiguration ; presque rien de supra-humain ; ce sont... des faits, aussi bouleversants soient-ils. Ces apparitions ne sont pas relatées comme des rêves mais comme ayant la simple densité du réel. On touche les blessures de Jésus. Il mange... Ce qui nous est dit, c’est qu’il est à nouveau vivant, d’une vie différente mais dans son corps..  

Le respect des sources interdit donc d’évacuer la Résurrection en la classant parmi les allégories du “spirituel” (“c’était pour dire que…”), ou parmi les projections psychologiques.

 

Le cri d’il y a deux mille ans est le fil conducteur de la foi chrétienne :

“Il est VRAIMENT ressuscité.”

 

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[*]  Ressuscité ?   (FAC, 1984).

 

 

Commentaires

JOUER SUR LES MOTS

> Foi en la Résurrection ou résurrection de la Foi. Il y a quelques dizaines d'années, en jouant ainsi sur les mots, certains théologiens ou exégètes faisaient de la Résurrection une simple saute d'humeur des apôtres qui seraient sortis de leur accablement devant la mort de Jésus, pour relire toute son histoire autrement. Ils disaient: à Pâques, il n'est rien arrivé à Jésus mort, mais les apôtres ont retrouvé le moral, ils ont "positivé" les événements traumatisants qu'ils venaient de vivre. En disant cela, ils ne faisaient qu'ajouter un nouveau paragraphe au livre de Qohélet dans l'Ancien Testament: "un temps pour déprimer, un temps pour positiver" !
L'Evangile nous décrit pourtant Jésus ressuscité qui mange devant ses disciples - Luc 24, 41/42 - ou encore Jésus ressuscité qui attend ses apôtres sur une plage avec un feu préparé et des pains et des poissons en train de cuire - Jean 21, 9 et suivants - (Jésus ressuscité aurait-il fait les courses au marché voisin pour acheter ces pains et ces poissons ?).
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Écrit par : B.H. / | 22/04/2019

GRANDS PRÊTRES

> Faudra-t-il que nous corrigions la finale de l’Evangile du jour, pour que s’ouvre un débat vraiment honnête sur France Culture ? Après les avoir entendus, il importerait de revoir Matthieu 28, 12-15 :
« Ceux-ci [les grands-prêtres de l’info], après s’être réunis en conférence de rédaction, donnèrent aux chroniqueurs une forte sommation en disant : “Voici ce que vous direz : ‘Ses disciples sont venus voler le corps, la nuit pendant que nous dormions.’
Et si tout cela vient aux oreilles, voire aux yeux (une apparition du crucifié !!) du peuple, nous ferons la part de la réalité et du paranormal (‘Voici l'hologramme !’) de la chose, et nous vous éviterons tout ennui. »
Les chroniqueurs prirent leur cachet et adoptèrent le point de vue visionnaire des grands-prêtres de l’info. Et cette explication s’est propagée dans le Tout-Média jusqu’à aujourd’hui. »
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Écrit par : Denis / | 22/04/2019

2e DIMANCHE

> J'ignore quel évangile est lu chez nos frères réformés le deuxième dimanche de Pâques, mais le pasteur Marguerat doit quand même savoir quelle est l'invitation faite par le Christ à l'apôtre Thomas lorsqu'Il lui "apparaît"...
Cela posé, joyeuses Pâques : Il est vraiment ressuscité !
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Écrit par : Sven Laval / | 22/04/2019

JOIE IMPRENABLE

> "Le respect des sources interdit donc d’évacuer la Résurrection en la classant parmi les allégories du “spirituel” (“c’était pour dire que…”), ou parmi les projections psychologiques. "
Un de ces derniers dimanches de Carême, en attendant la conférence du P. de Menthière, j'ai dû subir la fin de celle du pasteur de l'Eglise réformée... qui soutenait justement que la résurrection de Jésus n'était qu'un symbole, à grand renfort de capillotractage et de citations d'auteurs récents, mais, ô aveu en creux, sans presque jamais citer les Évangiles !
Il était douloureux de se sentir si éloigné de quelqu'un qui se dit d'une confession chrétienne.
Par contraste, quelle joie spirituelle ensuite que d'écouter la conférence du père Guillaume de Menthière, qui prenait l'exact contrepied du pasteur protestant, et insistait avec force et raison sur les preuves concrètes, sur les faits matériels et les évidences de la Résurrection du Christ.
À ce sujet, j'ai également vu récemment 'The Case for Christ', adapté du livre de Lee Strobel ('Jésus l'Enquête' en français), qui peut être une bonne introduction à l'étude de la Résurrection de Jésus, voire servir dans des groupes d'aumônerie, de catéchuménat, ou pour parler avec des amis non croyants, par exemple.
En tout cas, après l'incendie de Notre-Dame de Paris et l'émotion nationale qui révèle le fond catholique de la France, on sent bien que les médias se sentent obligés d'opérer un retour de balancier, un rééquilibrage, pour bien montrer que le pays est quand même fortement déchristianisé. Voir par exemple ces débuts d'articles récents du Monde :
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2019/04/19/des-maries-pas-tres-catholiques_5452757_4497916.html

https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2019/04/20/en-france-on-dissocie-la-culture-chretienne-du-culte_5452893_4497916.html

Joyeuse fête de Pâques à tous ! Jésus est ressuscité ! Notre joie est imprenable (comme on dit 'une vue imprenable' ?).
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Écrit par : Alex / | 22/04/2019

@ B.H.

> "certains théologiens ou exégètes faisaient de la Résurrection une simple saute d'humeur des apôtres qui seraient sortis de leur accablement devant la mort de Jésus"

Vous pouvez ajouter : certain évêque français soutenant cette thèse à demi-mot dans une tribune de TC, avant d'émettre une rétractation de mauvaise grâce devant la levée de boucliers.
Et je vous passe ce qui est couramment enseigné dans les facultés "catholiques" qui "démythifient" à tour de bras. À quand une débultmannisation en règle de ces dernières ?

Valérien K


[ PP à VK – Disons plutôt aujourd'hui : "encore dans certaines facultés catholiques". La pire époque est derrière nous. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Valérien K / | 22/04/2019

MARGUERAT

> Je n'ai pas encore lu "Vie et destin de Jésus de Nazareth" mais j'ai lu d'autres livres de Daniel Marguerat, il m'est arrivé aussi de l'entendre; j'ai toujours été impressionné par la force, la profondeur de son témoignage de Foi. Je viens de retrouver dans ma bibliothèque un livre de cet auteur intitulé: "Résurrection. Une histoire de vie" (Editions Cabédita). Voici ce que je lis pp. 59-60:

(...) la diversité des témoignages n'est pas un handicap. Une expérience vécue n'est jamais la photocopie d'une autre. De plus, son côté éminemment subjectif conduit à la singularité de chaque récit. En revanche, pour pouvoir ramener ces expériences visionnaires à un commun dénominateur, il faut qu'elles attestent d'une structure commune. Est-ce le cas? Oui.
Quatre traits se retrouvent en permanence: 1) seuls des croyants sont impliqués; 2) la rencontre a lieu à l'initiative de Jésus; 3) la rencontre pointe sur l'identification du Crucifié; 4) elle culmine dans un envoi assorti d'une promesse.
Reprenons. Jésus ne se manifeste qu'à des croyants, à qui il permet de renouer une relation cassée par la mort. Ces croyants ont de la peine à le croire, mais jamais le Christ ne s'exhibe pour fournir une preuve à des incrédules.
C'est Jésus qui se fait voir, prenant l'initiative de se faire reconnaître vivant alors qu'on pensait son cas liquidé. L'apparition manifeste une précédence de Dieu face à des hommes ayant atteint la limite de leur espoir et de leur pouvoir.
La pointe de ces récits n'est pas - comme on le dit à tort - que des hommes ou des femmes ont reconnu Jésus, mais qu'ils ont vu le Crucifié vivant. Ce troisième trait différencie Pâques des retours de zombie: il ne s'agit pas d'apprendre que Jésus est toujours là, mais que Celui qui est là n'est autre que le Crucifié. C'est à la marque des clous que le Vivant se fait reconnaître.
Dernier trait: la manifestation que le Crucifié vit remet en route les personnes. Envoi missionnaire, promesse d'assistance, don de l'Esprit concrétisent ce re-départ des croyants, prenant le relais du Maître qui s'efface."

Sandro Poretti


[ PP à SP – Oui, Marguerat a publié des travaux intéressants. Notamment ses contributions à l'ouvrage collectif 'Jésus de Nazareth, nouvelles approches d'une énigme' (Labor et Fides 2003)... Le problème est le passage du registre universitaire pointu au registre médiatique : le sens des mots s'altère et l'auditeur en tire des impressions qui ne sont pas toujours conformes à la pensée de l'auteur, laquelle est souvent déformée par le journaliste qui en parle ; etc. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Sandro Poretti / | 22/04/2019

BASES DE LA FOI

> Cela peut être rapproché du mal qu'a pu faire la méthode dite historico-critique. Il est bon de faire une critique des textes, il est bon de s'aider de la science historique, mais il est idiot de penser que cela puisse confirmer, infirmer ou préciser les témoignages sur la vie, la mort et la résurrection du Christ.
Je me souviens de l'explication donnée dans ce sens par un professeur à la fac d'histoire de la Sorbonne, qui affirmait l'impuissance des historiens à analyser qui était Jésus et ce qu'il avait fait.
Cela fait bien longtemps que des non-historiens, historiens du dimanche, croient pourtant pouvoir faire des hypothèses et dire que ce qu'ils appellent faussement "L'Histoire" les valide. Cela arrive malheureusement aussi à des membres du clergé. En notre époque positiviste, on aimerait bien découvrir sous les textes des évangiles le film exact des évènements pour pouvoir nous appuyer enfin sur un savoir et non sur une foi.
"Heureux ceux qui n'ont pas vu et qui ont cru." (Jn 20, 29) Rencontre, témoignage et confiance sont les bases de notre foi, bases qui échappent à toute science et à tout savoir.
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Écrit par : Guadet / | 22/04/2019

LONGTEMPS

> "[...]les brebis le (le berger) suivent, parce qu'elles connaissent sa voix" (Jn, 10:4)
Il y a longtemps que je ne suis plus les idées portées par la voix par M. Marguerat.
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Écrit par : Fernand Naudin / | 22/04/2019

Christ est ressuscité !

> Rien de nouveau sous le soleil... La Résurrection du Christ a toujours été la pierre d'achoppement de ceux qui ont voulu réduire la Foi à des catégories rationnelles.
Saint Paul dit que si le Christ n'est pas ressuscité, notre foi est vaine; tout comme la naissance miraculeuse de Jésus, la Résurrection est une occasion de faire un "saut dans le vide",et de s'ouvrir à une autre dimension, sans laquelle la Foi chrétienne se trouve réduite à une "religion", assez peu susceptible de transfigurer le monde, pas plus que nos cœurs.
Une certaine théologie d'école semble avoir oublié que "Dieu S'est fait homme pour que l'homme devienne dieu".(Irénée de Lyon)Il serait grand temps de revenir au Fondamentaux...
En Vérité, Il est Ressuscité !
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Écrit par : Philippe S./ | 23/04/2019

DE TELS "CROYANTS"

> Je ne connais pas la citation exacte mais St Paul a écrit "si le Christ n'est pas ressuscité notre foi est vaine".
Je trouve M Onfray plus cohérent qu'un pasteur ou certains cathos "progressistes" pour qui la résurrection n'est qu'une rêverie des disciples. En ce cas Jésus n'est plus qu'un sage, style Confucius, Gandhi ou M Luther King. Avec de tels "croyants" pas étonnant que les églises se vident.
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Écrit par : professeur Tournesol / | 23/04/2019

CONFUSIONS

> Je me souviens d'une conférence sur les fins dernières donnée à ma paroisse.
Le conférencier explique le lien entre le péché originel et la mort, le vieillissement, la dégénérescence ...
(le péché coupe le lien entre le Créateur et la création, la nature est donc laissée à elle-même : coupée de l'éternel, elle dégénère, vieillit, conduit à la mort).
Un vieux monsieur lève la main et déclare "je ne comprends pas, j'ai suivi une formation scientifique et je sais* que l'usure fait partie des choses. Pourquoi la relier au péché originel ? Comment peut-on dire que la dégénérescence n'a pas toujours existé ?"
Et il était sincère !
En tant que croyant, il avait tellement séparé sa vie de foi de son travail scientifique qu'il n'avait jamais compris que la nature qu'il étudiait était la nature post péché originel, que seul Dieu est l'alpha et l'oméga de tout et non la science laquelle s'intéresse à la création et non au Créateur.
En tant que scientifique, il avait du coup remplacé Dieu par la/sa science sans s'en rendre compte et il prétendait naïvement tout expliquer à travers la science exacte (la sienne).

Plus généralement, on a là un excellent exemple je trouve de l'incompréhension enfantine engendrée par le fait
-de confondre la science avec sa science,
-de prendre la science exacte pour l'alpha et l'oméga ce qui amène à penser que dès qu'une chose ne peut être démontrée par aucune équation ou aucune observation au microscope, alors cette chose n'appartenant pas au domaine scientifique, elle n'existe pas.
On est là en plein scientisme, en plein subjectivisme, en pleine puérilité.
Et c'est pour cela qu'il ne comprenait pas. Que la dégénérescence ne soit pas une notion éternelle (la matière elle-même ne l'est pas) il ne l'avait jamais compris.
D'une certaine façon il résonnait comme avant Georges Lemaître.

* notez bien : "j'ai suivi une formation scientifique" et "je sais"; le lien inconscient est symptomatique.
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Écrit par : E Levavasseur / | 24/04/2019

à E. Levavasseur

> Attention tout de même de ne pas confondre la notion de finitude, inhérent à notre nature humaine et non liée au péché originel selon le Père Gustave Martelet, et la notion de "dégénérescence".
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Écrit par : Michel de Guibert / | 24/04/2019

@ E. Levavasseur.

> Votre vieux monsieur est dans le vrai. En physique cela s'appelle l'entropie. A moins que le péché originel n'ait pas seulement détraqué la nature humaine mais toutes les lois physiques et mathématique de la création. Ce qui serait étrange.
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Écrit par : Pierre Huet / | 24/04/2019

> Je suis étonné de ce que vous dites sur Marguerat. J'ai lu récemment son livre sur saint Luc, "L'Historien de Dieu", qui m'a paru tout à fait orthodoxe et, surtout, passionnant. C'est mieux que "Le Royaume" de Carrère, plus scientifique, davantage porté par le frémissement de la foi. Je le recommande (éditions Bayard).

Bégand


[ PP à Bégand – Je ne "dis" rien sur Marguerat : je lis ce qu'il a dit lui-même, j'écoute l'effet que cela a produit sur un chroniqueur de France Culture, et je me pose des questions. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Bégand / | 25/04/2019

à Éric Levavasseur :

> Il y a quelques années, lors de la découverte du boson de Higgs, le regretté Stephen Hawking l'avait désigné "particule de Dieu". Le boson de Higgs remettait en cause notre conception de la masse : ainsi elle ne résultait plus de l’accroissement de la matière mais plutôt de l’interaction de cette matière avec un champ scalaire, le champ de Higgs, composé de bosons éponymes.
Certains scientifiques, dont Étienne Klein, s’étaient étonné du qualificatif attribué par le savant britannique : pour tout croyant qui suppose que Dieu est créateur du Ciel et de la Terre, des choses visibles et invisibles, le boson de Higgs n’est pas plus divin qu’un atome d’hydrogène ou une bouse de vache saturée de carbone et d’azote. Tous sont composés d’éléments créés par Dieu : ils sont donc des créatures, sans qu’une gradation ne soit nécessaire entre elles quant à leur proximité avec leur Créateur : il n'y a pas de "particule de Dieu". Les grands scientifiques peuvent parfois dire n’importe quoi !
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 25/04/2019

@ M de Guibert

> Je me demande comment on peut confondre les deux ?

@ P Huet

> Ce vieux monsieur parlait de la dégénérescence du vieillissement, de la maladie du vivant, notamment de l'homme, et là oui c'est la conséquence du péché originel.
Pour ce qui est de la nature, on sait qu'elle est "maudite à cause du péché de l'homme" c'est-à-dire qu'elle n'est plus parfaite comme au moment de sa création.
Elle est laissée à elle-même, elle n'est plus en communion avec Celui qui est la perfection, elle ne le révèle plus à sa manière, mais se trouve à la dérive : alors oui, elle a dégénéré.
Elle est un peu comme un corps privé de vie qui reste beau mais qui est sans âme.
Elle est passée de "Création", qui sous-entend "Créateur", à "Nature", qui sous-entend abandon.
Pour qui est des lois de la physique je ne crois pas, et l'Eglise n'a jamais dit, qu'elles ont changé avec le péché originel : les écarts de température on toujours fait éclater la pierre, avant ou après le péché originel. Ce n'est pas une dégénérescence, c'est un cycle. Les résidus de cette roche formeront à leur tour à nouveau corps (du grès par exemple).
Mais il n'y avait pas la mort ou la maladie ou la vieillesse pour l'humain que Dieu a créé à son image, ni pour les animaux, car Dieu est bon et dans sa création la souffrance n'existait pas plus que la mort.
En revanche minéraux et végétaux ne souffrent pas et le développement de champignons sur un arbre que nous considérons généralement comme une maladie, n'est qu'un cycle.
De toute façon ce qui m'intéressait dans le commentaire de ce vieux monsieur c'était sa façon de passer la foi au crible de la science exacte, ce qui est très naïf.
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Écrit par : E Levavasseur / | 26/04/2019

@ Pierre Huet, Michel de Guibert, E. Levavasseur :

> Je vais essayer d'approfondir le débat, ce qui n'est pas simple et risque d'être un peu long. Je vous prie de bien vouloir m'en excuser. J'ai également fais des études scientifiques, mais aussi essayé de me former en théologie. J'espère que je ne dirai pas trop d'âneries et prie tout mieux formé que moi de bien vouloir me corriger. Surtout que les sujets à aborder sont pointus et nécessitent beaucoup beaucoup d'humilité dans la façon de les présenter.

Premier point : il existe un monde invisible. C'est un article de foi. Il s'y trouve des forces qui dépassent notre compréhension (entre autres anges et anges déchus). Ce monde est intriqué avec le monde visible (d'où les miracles).

Second point : le monde visible est certes fini (a priori, il est vrai que ce point est scientifiquement discutable. En tout cas le soleil et la terre le sont, eux) mais il est en plus (au moins) incomplet : il y a en lui une violence un déséquilibre qui tiennent au moins du désordre voire du mal.

La Bible mentionne ce désir d'un monde où transparaît la paix à la fois dans les description de la Genèse de la création ("je donne aux animaux toute herbe verte" alors que, vu leur dentition actuelle, les lions et les loups paineraient à manger de l'herbe) et dans les descriptions du monde futur (le loup et l'agneau dormiront ensemble, etc...).
Ces images n'ont pas à être interprétées telles quelles, mais disent bien quelque chose de l'état de notre monde et de l'aspiration à autre chose.

Je ne sais pas pour vous, mais un monde qui se limite à la seconde loi de la thermodynamique, qui conduit tout à l'ordre, à l'immobile et au froid, n'est pas un monde que je peux trouver pleinement bon.

En théologie dirons-nous "classique", l'homme est une créature VRAIMENT à part. Tellement à part que, étant image de Dieu et à sa ressemblance il a des liens invisibles avec l'ensemble de la Création : "tout est pour vous, et vous êtes au Christ et le Christ est à Dieu".
Ceci fait que, lors du péché originel, la création DANS SON ENSEMBLE a été comme "réécrite", marquée par le péché, et elle aussi, comme l'Homme est en attente de sa rédemption.
Problèmes : déjà, situer l'évènement dans le temps est un gros souci (vu que l'on sait que les premiers chapitres de la Genèse n'ont pas une vocation historique, surtout depuis le fait de l'évolution prouvé en particulier pour l'homme).
Ensuite, ce réel mystère de communion de l'homme non seulement avec tous les hommes mais aussi avec la nature dans son entier peut conduire très vite à des interprétations farfelues (cf Léon Bloy qui rattache éruption volcanique et communion de sa fille je crois), et, en poussant le curseur trop loin, on risque d'aboutir à une vision gnostique (monde matériel "mauvais" VS monde à venir / monde spirituel "bon") et à un mépris de la nature inféodée/inférieure à l'homme.

En réaction à un vrai problème théologique (superposition du récit biblique et de la notion de chute, elle platonicienne) et aux soucis liés au clash découverte scientifique du fait évolutif VS vision transmise jusqu'alors (réalité historique d'Adam et Eve), une certaine théologie plus récente préfère voir la création non pas marquée par le péché mais incomplète. Charge à l'homme, mandaté par Dieu, d'amener la création à sa perfection.

Le péché originel serait dans ce cas là plutôt à voir non pas comme une faute à racheter, mais comme un état d'incomplétude à reconnaître qui nous fait rechercher la grâce de Dieu pour être complet, achevé, parfait.

Cf en particulier les derniers exemplaires de la (pourtant au début très bien posée et orthodoxe) série de Brunor Les indices pensables et surtout le tome 6 : le secret de l'ADAM inachevé.
En poussant le bouchon un peu loin, on arrive à un certain pélagianisme (salut à la force des mains de l'homme).

Même sans cela, cette vision n'est pas sans poser certains soucis, même si elle est beaucoup plus raccord scientifiquement (pas de problème lié à l'existence physique d'Adam ou du péché originel) : le Christ n'est-il venu nous sauver que de notre mal "humain"? Quelle est cette rédemption qu'il apporte? Et se profile derrière (même si elle n'est qu'esquissée dans le bande dessinée) une remise en cause du diable (sinon dans son existence, au moins dans sa nature d'ange déchu).

Je préfère pour ma part contempler l'immense mystère de l'Incarnation, celui de la communion des saints, de la piété et de l'iniquité, du Christ Seigneur et sauveur de toute la Création,attendre un ciel VRAIMENT nouveau, une terre VRAIMENT nouvelle, tout en me sachant solidaire et responsable, jusque dans des liens que je ne connais pas et comprend pas, de l'ensemble de la Création, bonne et merveilleuse, mais terrible et triste également, ne nous voilons pas la face.

Désolé si j'ai fait trop long. J'espère que la mise en page ne sera pas trop compacte. Et je serai ravi d'en discuter plus avant avec vous.
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Écrit par : Charles-Marie Bera / | 26/04/2019

@ Charles-Marie Bera, Michel de Guibert, E. Levavasseur :

> Pourquoi la dégradation de la matière est-elle irréversible ?
Dieu n'a pas créé le monde dans le temps, il a créé le monde avec le temps
Cet phrase pourrait être être l'énoncé d'un des aspects du modèle cosmologique admis actuellement, fondé par l'abbé Lemaître de l'université de Louvain (XXe s.), mais il est due à saint Augustin d'Hippone (fin IVe).
Le temps est en effet une des 3 principales grandeurs physiques de la face matérielle de la création, avec l'espace et le couple énergie-matière. Si ces grandeurs sont reliées entre elles par les lois physiques, celles ci sont soumises à une logique mathématique, que nous appelons le hasard mais dont l'universalité indique qu'elle est une intention du Créateur! Universalité car elle intervient de la structure de la matière à la constitution de notre génome. Et quand le hasard intervient dans un processus, il y a toujours accroissement du désordre. La vie crée de l'organisation, mais en accroissant le désordre dans l'environnement de l'être vivant: excréments, rejet de chaleur etc.

Nous devons nous en contenter, à chaque étape de la création "Dieu vit que cela était bon", il ne nous est pas dit que cela était parfait. Oui, il y a une violence dans la nature. Violence des phénomènes astrophysiques et géologiques, violence animale qui n’exclue pas la beauté.

Ainsi, la Vie Eternelle, et son rapport avec la vie dans le temps sont extrêmement mystérieux, d'autant que la Résurrection, justement, n'est point désincarnée!
Mais incarnée comment, dans quoi? C'est que, dans le monde présent, la matière ne vit pas. Du carbone , c'est du carbone, de l'azote c'est de l'azote, dans une fumerolle volcanique comme dans mon chat. Pas de matière vivante mais de l'organisation, de l'information vivante de la matière, celle-ci étant un support, comme le papier et l'encre, ou un CD, sont le support d'une expression. Cette information, que devient-elle quand la mort décompose le grand livre de notre vie? Elle est conservée dans le monde invisible, qui est dans l'éternité donc pas lié au temps, donc pas au principe d'entropie.

Mais la Résurrection de la CHAIR, il me semble qu'il ne nous appartient pas de la comprendre.
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Écrit par : Pierre Huet | 29/04/2019

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